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Rescapés catastrophe de Liévin
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Catastrophe minière (Liévin)
« Mon mari avait comme un pressentiment, il n’avait rien dit mais je le sentais… Le 26 décembre, on avait rendu visite à toute la famille comme s’il voulait dire au revoir à tout le monde : mes parents à Sallaumines, ma sœur à Billy, sa mère et sa tante à Grenay, une autre tante à Mazingarbe. Dans une maison, il avait même dit « s’il m arrive quelque chose, je te laisserai une pension mais je n’aimerais pas mourir au fond ». C’était sa hantise… Cette tournée dans la famille, on ne l’avait jamais faite ! De plus, mon mari travaillait un peu dans tous les puits car il était sondeur. Le hasard a voulu qu’il fût au 3 ce jour-là. C’est le destin d’autant qu’il avait demandé une journée de congé pour le 27 décembre. Cette journée lui avait été refusée.
Quand mon mari est parti le matin, je me suis recouchée mais il est revenu peu après car il avait oublié son jeton. Vers 8hOO, une voisine est venue me dire qu’il y avait eu un coup de grisou au 3 de Lens. Je n’avais pas peur pour mon époux car je le croyais au 4 puisqu’il avait pris sa voiture (il ne la prenait jamais quand il restait sur Liévin). Je suis quand même allée voir à l’entrée de la fosse mais on ne nous a rien appris sinon qu’il y avait des morts. En moi-même je plaignais les femmes dont le mari travaillait à Saint Ame, que d’heures terribles d’incertitude il leur était imposé ! Rentrant chez moi je me rendis compte que ma fille de 11 ans avait, je ne sais pourquoi, démonté le sapin. Avait elle aussi un pressentiment ? L’après midi, mon mari n’était toujours pas rentré et je me suis dit qu’il était aller voir sur le carreau de fosse ce qui s’était passé.
Il régnait en effet une telle effervescence que ceci était plausible. Vers 19h30, deux officiels sont venus à la maison et m’ont simplement dit qu’il fallait venir car les corps avaient été remontés : c’est par ces mots que j’ai appris la mort de mon mari. Devant son cercueil, posé par terre, je comptais et recomptais, une à une, incrédule, les syllabes de son nom sur l’étiquette, et je lisais et relisais : O…. H… Aux funérailles, il n’y avait plus une fleur dans le fourgon, tout avait été mélangé et le corps de mon mari fut ainsi conduit à Grenay. En rentrant du cimetière, mes enfants m’ont dit : on n’a plus de papa… Le comble, c’est que j’ai dû rembourser les outils et les bleus de travail. On n’a vraiment pas été ménagé. J’ai vécu trente ans comme au premier jour. Je ne me suis jamais vraiment remise. »
http://centriris.com/catastrophe%20hbnpc/page13.php
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